L'audit des finances publiques pour les nuls

Le rapport annuel de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques a été rendu public le 29 juin dernier. Cet année, il intègre l’audit des finances publiques demandé par le Premier Ministre (audit sur l’exercice budgétaire en cours).

Pour lire le rapport, c'est ici.

Pour la synthèse, c'est là.

Pour la synthèse de la synthèse (en moins barbant), vous êtes au bon endroit.

La Cour des comptes, c’est quoi ?

La Cour des comptes, ce n’est pas seulement un rassemblement de vieux croûtons dégarnis habillés bizarrement (même si c’est aussi un peu ça…).

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La Cour des comptes, c’est aussi (extrait site web) « l’institution supérieure de contrôle chargée de vérifier l’emploi des fonds publics et de sanctionner les manquements à leur bon usage (…). Les juridictions financières sont indépendantes des pouvoirs publics. Dans le cadre prévu par la loi, elles définissent librement leur programme de travail, sont dotées de pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place, adoptent librement leurs conclusions et jouissent d’une liberté éditoriale ». C’est l’une des instances les plus prisées des jeunes diplômés de l’ENA, généralement après l’Inspection des Finances et le Conseil d’Etat.

A côté des rapports annuels, la Cour et ses démembrements travaillent régulièrement sur des thématiques particulières et l’analyse des comptes des collectivités locales lors de contrôles périodiques. Comme son nom ne l’indique pas, la Cour ne travaille pas que sur l’analyse des comptes, mais également sur la qualité de la gestion des administrations publiques.

Que pointe la Cour dans son audit (de pire que d’habitude) ?

La Cour pointe régulièrement les dérapages des finances publiques et le poids de la dette dans le budget de l’Etat. Rappelons au passage que depuis quelques années les intérêts de la dette se disputent avec l’Education Nationale la place de 1er poste de dépenses de l’Etat. Contrairement à ce qu’on tente parfois de nous asséner, la question de la dette n’est ni de droite, ni de gauche (l’horrible droite austéritaire contre l’horrible gauche dépensière). Avec moins de dette, on peut baisser les impôts ou améliorer les services publics, au choix (alternative qui ne colle pas parfaitement non plus au clivage gauche-droite, soit dit en passant).

Rappelons aussi un principe fondamental du budget de l’Etat, à partir d’une comparaison intéressante avec les collectivités locales. Les collectivités doivent de par la loi voter un budget en équilibre : recettes = dépenses. Comme le budget est un acte prévisionnel, l’exécution budgétaire s’écarte tout naturellement de la prévision, et les collectivités constatent en fin d’année un déficit ou un excédent au regard de la prévision. L’Etat, lui, est en situation de déséquilibre budgétaire dès le vote du budget. Ainsi, en 2017, le budget de l’Etat prévoit 247,7 Md € en recettes nettes, et 322,4 Md € en dépenses (vous avez bien lu).

Ce que la Cour pointe de particulier cette année dans le cadre de son audit d’exécution en cours d’année, c’est à la fois :
  • L’existence d’un dérapage important au regard de la prévision, autrement dit un « déficit du déficit »
  • Surtout, le caractère insincère du budget, c’est-à-dire le fait que le gouvernement précédent était parfaitement au fait de l’absence de fiabilité du budget préparé

Ainsi la Cour note (page 11 de la synthèse) que « les dépenses apparaissent manifestement sous-évaluées », avec un risque de dépassement évalué à 5,6 Md € par rapport à la prévision, qui « provient pour l’essentiel de budgétisations insuffisantes (4,2 Md€) » (page 13). Fait intéressant, la Cour relève que « le risque de dérapage du déficit public pour 2017 est du même ordre que celui mis en évidence lors de l’audit des finances publiques de 2012 », année de la précédente présidentielle. Mais la Cour note aussitôt que « en revanche, ses origines sont très différentes : alors que l’écart relevé en 2012 provenait d’une révision à la baisse des hypothèses de croissance économique et d’une surestimation du rendement de certains impôts, il résulte en 2017 quasi exclusivement d’une sous-estimation des dépenses de l’État, sur lesquelles les pouvoirs publics disposent pourtant des capacités d’action les plus directes ».

La Cour appelle ainsi pour tenir la prévision à des mesures drastiques : « à ce stade de l’année, elles ne peuvent passer que par un report ou une annulation de toutes les mesures d’accroissement de dépenses publiques non encore mises en œuvre et par des mesures d’économies portant sur toutes les administrations publiques ».


Et la Cour de conclure pudiquement que « des progrès sont nécessaires pour garantir la sincérité des projets de loi de finances adressés au Parlement et des Programmes de stabilité soumis à l’examen de la Commission et du Conseil européens »…

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